iniyaitu ilmu syahadat Ruh Semulajadi insyaAllah. semua yang di cari ada di sini. contoh : - misal : kalian ingin agar hidup banyak yang menyukai. (mendapat penghargaan,kasih sayang,cinta dan lain. lain) itu amalkan saja ilmu syahadat Ruh Semulajadi. nya dan lihat saja perkembangannya di kemudian hari. Deux niveaux principaux et deux types de maîtres 1 Les Maures de Mauritanie sont des bédouins parlant un dialecte arabe, le ḥassâniyya. Ils pratiquen ... 2 En Iran, c’est le terme persan maktab, inspiré de l’arabe, qui est employé pour désigner l’enseign ... 1L’analyse de l’enseignement coranique en Mauritanie1 permet de s’interroger sur la pertinence de l’expression École coranique ». D’une part, dans la société maure, à un niveau élémentaire, l’enseignement coranique ne porte pas de nom spécifique ; le terme arabe de kuttâb de kitâba écriture2 connu, entre autres, en Afrique du Nord et en Afrique de l’Ouest, n’est pas employé. L’expression qui est en l’occurrence utilisée pour signifier qu’un enfant suit cet enseignement – Il étudie sa tablette » yagra lawḥû » – est suggestive, en ce qu’elle se réfère, non pas à un lieu d’instruction déterminé, mais au support même de l’apprentissage, constitué par la tablette lawḥ. 2Élément fondamental de l’apprentissage du Coran, la tablette sur laquelle est inscrite la leçon se présente comme une mince planchette rectangulaire en bois d’aglal Mitragyna inermis aux angles supérieurs arrondis. Cet écritoire indique, d’une part, le caractère interpersonnel de la transmission entre maître et élève, qui se passe de la médiation du livre. D’autre part, ce support mobile suggère que l’enseignement peut avoir lieu n’importe où, pourvu qu’il reste sous le contrôle du maître, par exemple à son domicile ou encore lors de ses déplacements. Ce n’est d’ailleurs qu’au cours de l’apprentissage que la récitation du Coran en marchant est autorisée par le droit malékite Ibn Sahnûn 1953 97. 3L’expression d’ École coranique » est donc peu adaptée pour désigner cette forme d’enseignement, d’une part, comme nous l’avons vu, parce qu’il ne s’agit nullement d’une école proprement dite, et d’autre part, comme nous le verrons, parce que l’apprentissage du Coran n’est pas exclusif de l’apprentissage d’autres savoirs. 3 Le terme de madrasa est également utilisé en Iran Naraghi 1992. 4 La lettre ḍâd de l’arabe classique a pour réalisation phonétique, dans le dialecte arabe de Maurit ... 4En revanche, à un niveau d’étude supérieur, le terme d’école est plus approprié bien qu’il ne soit pas entièrement satisfaisant. À la différence de l’enseignement primaire », l’enseignement supérieur, réunissant un nombre important d’élèves, et parfois plusieurs maîtres, est désigné par un vocable particulier. Il ne s’agit pas du terme arabe de madrasa de darasa étudier, utilisé dans de nombreux pays3 d’Afrique du Nord et d’Afrique de l’Ouest, mais du mot maḥâḍra, maḥâzra en ḥassâniyya, qui dérive de l’arabe ḥâḍara séance4. 5 Il subsiste surtout des mḥâẓar dans la région de l’Iguidi, où est installée la confédération marab ... 5Dans la société maure, l’érudit qui enseigne une pluralité de disciplines est appelé âlim tandis que le spécialiste des sciences juridiques est nommé fqîh. Les mḥâẓar pluriel de maḥâzra pluridisciplinaires se situent en particulier dans la région du Trarza, et celles dans lesquelles enseignent les spécialistes des sciences juridiques fuqahâ’, dans l’ensemble du pays, bien qu’aujourd’hui elles tendent les unes comme les autres à se raréfier5. 6Un étudiant en quête d’un maître reconnaît un érudit à ce qu’il l’invite à commencer la leçon en lui disant Récite ! », ou littéralement Avance ! » mashshî ! », n’évoquant en rien la spécialité qu’il cherche à approfondir. De surcroît, l’érudit est capable de répondre à n’importe quelle question, sans consulter aucun livre ou manuscrit. 6 Le vrai nom de Nâbigha al-Ghallâwî est Muḥâmmad wuld Amar. Il est décédé à Tanawbak en 1245 H. ou ... 7 Il a épousé Maryama mint Ubaydî, de la fraction Idabḥum des Awlâd Daymân, groupe apparenté à celu ... 7L’itinéraire intellectuel d’un lettré du xixe siècle, Nâbigha al-Ghallâwî, est à cet égard, paradigmatique. Après avoir étudié auprès de son oncle maternel6, il quitta sa tribu maraboutique, les Laghlâl, et sa région, le Hawdh, à la recherche d’un enseignement pluridisciplinaire. Lorsque les maîtres qu’il allait consulter au cours de ses pérégrinations lui demandaient quel savoir il souhaitait approfondir, il passait son chemin. Enfin, il s’installa à Daykhan, chez Aḥmad wuld al-’Aqil de la tribu des Awlâd Daymân Idabḥum du Trarza, qui répondit à l’ensemble de ses questions et dont le premier mot fut celui qu’il attendait mashshî ! ». Il épousa une parente de son maître et resta toute sa vie dans l’Iguidi7. Comme le montre cet exemple, il arrive que la transmission de savoir amenant un individu à s’installer dans le groupe de son maître se prolonge par une alliance qui finit par l’y intégrer définitivement. 8 Plutôt que maḥâẓra noire et jaune », elle est aussi appelée maḥâẓra bleu-verte et jaune » m ... 8Compte tenu du grand nombre d’étudiants présents dans ces mḥâẓar, les érudits ulamâ’ choisissent fréquemment de n’enseigner qu’une discipline et laissent les autres matières à des maîtres adjoints spécialisés. Au début du xviiie siècle, une maḥâẓra de la tribu des Idaydjba au Brakna était appelée maḥâẓra noire et jaune » maḥâẓra kaḥla wa safra » par référence aux couleurs des tentes dans lesquelles avait lieu l’enseignement8 ; l’une, brune, était tissée en poils de chameau et l’autre, beige, en poils de mouton. Les étudiants pouvaient passer une grande partie de leur vie à la maḥâẓra, parfois une trentaine d’années. Fondement coranique de l’apprentissage 9Après l’alphabet, le Coran est invariablement le premier des savoirs à être enseigné, puisqu’il est le fondement de l’instruction. Néanmoins, d’autres textes font aussi l’objet d’un apprentissage. À l’est du pays, la fin de l’enseignement du Coran doit être atteinte avant d’aborder tout autre texte, tandis que les autres régions diversifient les études, plus rapidement. Dans la société maure, l’enseignement primaire concerne les deux sexes de toutes les catégories sociales à un niveau élémentaire, mais est surtout l’apanage des fils de marabouts à un niveau supérieur Fortier 1997, 1998. 10En Mauritanie, chaque région met l’accent sur un certain type de connaissance. En général, après la mémorisation d’une partie du Coran, les élèves commencent l’étude du dogme aqida et du droit musulman fiqh dans des ouvrages de difficulté progressive. Dans ces deux domaines, à un premier stade, les élèves apprennent les vingt attributs de Dieu et les obligations personnelles » furûḍ al-’ayn » nécessaires à la dévotion ibâda, comprenant les règles de purification ṭahâra, de la prière salât, du jeûne sawm, de l’impôt religieux zakât et du pèlerinage ḥajj. 9 Certains textes écrits par des érudits locaux sont néanmoins entrés dans le corpus islamique d’ens ... 10 La comparaison du corpus d’ouvrages étudiés en Mauritanie avec celui du Mali Tamari 1996 48, d ... 11Pour ce faire, sous la conduite de leur maître, les élèves étudient le contenu de plusieurs livres, suivant un ordre d’explicitation croissant. À l’exception des commentaires écrits par des érudits locaux9, certains traités étudiés dans les différentes disciplines font également partie du corpus d’autres pays musulmans, spécialement de rite malékite, pour ce qui concerne le droit10. Il existe, en effet, une culture de base commune aux sociétés musulmanes qui s’explique en grande partie par l’étude de sources textuelles analogues. La référence à un même socle scripturaire rend compte de la similitude de certaines institutions et représentations au sein de sociétés musulmanes culturellement diverses. 12La plupart de ces œuvres sont, en outre, plus connues sous le nom de leur auteur que d’après leur titre. L’ouvrage initialement étudié en droit musulman est al-Akhḍarî Algérie, xvie siècle. Puis est enseigné Ibn Ashir Maroc, xviie siècle dont le premier chapitre traite du dogme aqida, le second du droit fiqh, et le troisième de la mystique tasawwuf. L’histoire des débuts de l’islam sîra est abordée à travers Qurat al-Absâr d’al-Lamṭi Maroc, xvie siècle. Par ailleurs, les filles sont initiées à un petit recueil de hadith aḥâdîth appelé Dalâ’il al-khayrât Les voies menant aux bonnes œuvres d’al-Djazûlî Maroc, xve siècle. 13À un second stade, les fils de marabouts s’instruisent, dans des ouvrages juridiques plus approfondis, des devoirs nécessaires à la vie sociale mu’âmala. Ceux-ci comprennent d’une part, les obligations solidaires » furûḍ al-kifâya », c’est-à-dire celles dont l’accomplissement par un nombre suffisant de personnes dispense les autres de les exécuter, par exemple l’enseignement du Coran, la prière des funérailles. D’autre part, ces ouvrages de droit traitent des obligations personnelles » furûḍ al-’ayn », comme les obligations matrimoniales, commerciales, pénales et successorales. 14Entre dix et quinze ans est tout d’abord étudiée la Risâla d’al-Qayrawânî Tunisie, xe siècle, qui, à Chinguetti Adrar, est connue à travers la version versifiée de Abd-Allah wuld Ḥâjj Ḥamâhullah, lettré local du xviiie siècle de la tribu maraboutique des Laghlâl Hamel 1992 368, notice 167. Puis, entre quinze et vingt ans, sont enseignés, le Mukhtasar de Khalîl Égypte, xive siècle et, à partir d’une vingtaine d’années, la Asmiyya d’Ibn Asîm Andalousie, fin xive siècle et début xve siècle. 15Ensuite, s’ajoutent éventuellement à ce corpus des ouvrages de droit plus approfondis comme celui d’az-Zaqqâq Maroc, xvie siècle, ainsi que des commentaires shurûḥ des œuvres juridiques de base. Les explications d’Ibn Ashir fréquemment consultées sont celles de Mayyâra Maroc, xviie siècle et, à Chinguetti Adrar, celles d’Aḥmad Bashîr wuld Ḥanshî, qui est un lettré local du xixe siècle, de la tribu des Laghlâl. En Mauritanie, les commentaires les plus connus de l’ouvrage de Khalîl sont ceux d’ad-Dasûqî Égypte, fin xviiie siècle et début xixe siècle, d’’Abdal al-Bâqî Égypte, xviie siècle, d’al-Ḥattâb Libye, xvie siècle, d’al-Bannânî Maroc, xviiie siècle, d’Ibn Ghâzî Égypte, xve siècle, d’al-Mawwaq Andalousie, xve siècle et d’at-Tatâ’i Égypte, xvie siècle. 16Dans le Hawdh, l’enseignement repose essentiellement sur la récitation du Coran comme le suggère l’expression À l’est, le Coran et la musique » ash-sharg Qur’ân wa azawân ». Dans cette région, ce n’est, en effet, qu’une fois que l’étudiant connaît intégralement le texte coranique qu’il peut commencer à s’initier au droit musulman. S’ajoute, au corpus cité précédemment, l’étude d’un commentaire juridique de l’ouvrage de Khalîl écrit par un lettré du Hawdh de la fin du xviiie siècle et du début du xixe siècle appartenant à la tribu des Tanwâjyû Ṭurratu wuld Râq. Pluridisciplinarité dans la région du Trarza 17Dans la région du Trarza, l’enseignement est plus diversifié ; simultanément au Coran, sont étudiées les sciences auxiliaires » ’ulûmu al-’alâti », c’est-à-dire les disciplines enseignées, non pour elles-mêmes, mais comme moyen de rendre intelligible le savoir musulman » ’ulûmu ash-sharî’â » qui comprend le droit, la théologie et la mystique. Ces sciences auxiliaires » sont essentiellement la grammaire naḥw, la prosodie arûḍ, la morphologie as-sarf et l’histoire des Arabes târîkh al-’arab, abordées à travers des ouvrages de difficulté croissante. Un poème rend compte de ce cursus 18 Voilà comment se déroule l’enseignement/dans les diverses commence par le droit et “les disciplines auxiliaires” /si celui qui étudie en a les de wuld Buna est prioritaire/et mérite cette grammaire de Jarumi est obligatoire/ainsi que Ubaydu Rabihi. 11 Dans le dernier hémistiche de ce poème recueilli par mes soins, figure une citation du livre de gr ... 19L’étape suivante concerne l’étude de la Alfiyya/qui consigne les principes de la grammaire arabe »11. 20 bâyanu mâ min sirati ta’limî / kana laḥu vî saîr al-alumiwal ibtîda bi fiqhi wa al-alâti / in alaḥi lâhat ahliyâtikanat tâ’alif ban bûna Awla / zâka lahu fa hiyya lizâk awlawa farḍu ayn an-nahu vil Jarûmî / wa fî Ubaydu Rabihi al-manẓûmibil al-fay fâl Alfiyya / muqâsidun al-nahwi biḥâ mâḥwiyya ». 12 Comme son nom l’indique, Muḥâmmad Mawlûd wuld Aḥmad Fâl al-Ya’qûbî appartient à la tribu des Idayq ... 13 Cette question est discutée dans le droit musulman Qayrawânî 33. 21Le droit est enseigné à partir des œuvres précédemment citées auxquelles s’ajoute al-Kafâf, écrit au xixe siècle par un lettré local du Trarza, Muḥâmmad Mawlûd wuld Aḥmad Fâl al-Ya’qûbî12. Cet auteur traite de problèmes juridiques spécifiques à la vie nomade ; par exemple, il pose la question de savoir si l’eau du puits qui comprend des impuretés peut être utilisée pour les ablutions, ce à quoi il répond par l’affirmative Ould Bah 1981 8113. 14 L’itinéraire intellectuel de Nâbigha al-Ghallâwî a déjà été évoqué dans cet article. 22De plus, les élèves du Trarza étudient les explications d’ouvrages juridiques de base développées par certains lettrés de la région, comme le commentaire d’Ibn Ashir écrit par Nâbigha al-Ghallâwî, lettré appartenant à la tribu des Laghlâl de l’est de la Mauritanie et qui a fait ses études auprès des Awlâd Daymân du Trarza au début du xixe siècle14. En plus des commentaires de Khalîl précédemment cités, les étudiants lisent ceux d’érudits locaux tels que ceux de Wâlid wuld Khâlunâ Awlâd Daymân, fraction Idabḥum, fin xviiie siècle, d’Ḥabîbullah wuld al-Qâḍî – exerçant au début du xixe siècle dans la maḥâẓra noire et jaune » des Idaydjba au Brakna –, de Muḥâmmad wuld Muḥâmmad Sâlam Inshiri, Midlish, fin xixe siècle, de Maḥanḍ Bâbâ wuld Abayd ad-Daymânî Trarza, Awlâd Daymân, fraction Awlâd Bârikallah, milieu xixe siècle. En théologie, à un premier stade est étudiée l’œuvre d’al-Maqarrî Algérie, xvie siècle, et à un second stade, celle d’as-Sanûsî Algérie, xvie siècle ainsi que celle de Mukhtâr wuld Bûna lettré maure des Tâjakânat, xviiie siècle. 23Lorsque ces divers apprentissages sont achevés, les étudiants avancés du Trarza débutent l’étude des sciences complémentaires » al-mutam-mimât », comprenant les fondements du droit usûl al-fiqh, la logique manṭiq, la rhétorique balâgha et les mathématiques ḥisâb. La mystique n’est enseignée qu’à travers le troisième chapitre d’Ibn Ashir Maroc, xviie siècle qui se conforme à la voie mystique d’al-Junayd Iraq, ixe siècle. 24En grammaire, entre cinq et dix ans, l’élève étudie l’œuvre d’Abû Muḥâmmad ibn al-Qâsim ibn Alî al-Ḥarîrî al-Basrî Basra, Iraq, fin xie siècle et début xiie siècle et Ubaydu Rabbihi Le petit serviteur de Dieu dont l’auteur, du xviiie siècle, serait Muḥâmmad wuld Abdallah al-Ghallawî at-Tuwâtî, originaire de la tribu des Laghlâl. Cette œuvre est une versification de l’Ajrûmiyya de Muḥâmmad ibn Dâwud as-Sanhâjî Maroc, xive siècle. Secondement, à partir de dix ans, l’élève apprend la Alfiyya, traité de grammaire de mille vers écrits au xiiie siècle par le lettré andalou Muḥâmmad ibn Mâlik. 15 Il est d’usage de les nommer en français les Suspendues », le terme d’al-Mu’allaqât étant consid ... 25Au Trarza, l’élève, entre dix et quinze ans, est initié à la poésie shî’r avec Diwân as-Sitti. Ce recueil comprend les œuvres de six poètes Imru’ al-Qays bin Ḥujr al-Kindî, Zuhayr ibn Abî Sulmâ, Nâbigha adh-Dhubyânî, Tarafa ibn al-’Abd al-Bakrî, Alqama al-Faḥl, Antara ibn Shaddâd al-’Absî. Certains des poèmes cités dans cet ouvrage figurent parmi les dix Mu’allaqât15. L’étudiant mémorise également le poème Bânat Su’âdu, composé par le contemporain du Prophète, Ka’b Ibn Zuhayr, ainsi que la Lâmiyyat al-’ârab d’ash-Shanfarâ poète antéislamique, et la Duraydiyya d’ibn Durayd Iraq, xe siècle. En morphologie, sont enseignés la Lâmiyyat al-af’âl de Muḥâmmad ibn Mâlik Andalousie, xiiie siècle, ainsi que son commentaire, écrit à la fin du xixe siècle par un lettré de la région appartenant à la tribu des Tagunânat Ḥassân wuld Zayn. 16 Ibn Hishâm a édité l’ouvrage d’Ibn Isḥaq, lequel lui aurait été transmis par Ziyâd al-Bakkâ’î. 26En histoire, prévalent deux ouvrages d’Al-Badawî, lettré de la tribu des Midlish de la région du Trarza, ayant vécu à la fin du xviiie siècle et au début du xixe siècle ; l’un traite des généalogies des Arabes, Naẓm ansâb al-’arab, et l’autre, des conquêtes musulmanes, al-Ghazawât. Les œuvres concernant l’histoire des débuts de l’islam ne sont pas étudiées avec un maître, mais sont lues de par la propre initiative de l’étudiant. L’auteur le plus connu dans cette matière est Ibn Hishâm Égypte, fin viiie siècle et début ixe siècle qui s’appuie sur Ibn Isḥâq Iraq, viiie siècle16. Cette initiation à l’histoire musulmane peut être approfondie par le commentaire d’As-Sûhaylî Andalousie, xiie siècle ainsi que par l’ouvrage d’Ibn Sayid an-Nâs Andalousie, fin xiiie et début xive siècle. 27Vers vingt-sept ans, la science des fondements du droit est enseignée à partir de Marâqî as-su’ûd de Sîdî Abdallah wuld al-Ḥâjj Ibrâhîm, lettré maure de la fin du xviiie siècle et du début du xixe siècle, de la tribu des Ida’wali de Tijikja Tagant, complétée par le commentaire de cette œuvre intitulée Fatḥu al-wadûd alâ marâqî as-su’ûd, écrit par Muḥâmmad Yaḥya al-Walâti, lettré de Walata Hawdh ayant vécu à la fin du xixe siècle et au début du xxe siècle. D’autre part, l’élève étudie cette même matière dans Naẓm qawâ’d az-Zaqqâq wa sharḥuhu d’al-Fâsî Maroc, fin xviiie siècle et début xixe siècle et Murtaqâ al-wusûl ila ilmi al-’usûl d’Ibn Asîm Andalousie, fin xive siècle et début xve siècle. En logique, est enseigné Sullam d’al-Akhḍarî Algérie, xvie siècle, en rhétorique, Sharḥ aṭ-Ṭaybiyya d’as-Suyûṭî Égypte, xvie siècle, et en mathématiques, Munya d’ibn Ghâzî Égypte, xve siècle. 28Une fois terminée cette formation d’érudit, l’étudiant la parachève seul, en général pendant deux ans, dans des bibliothèques privées. Il peut alors lire, entre autres, des exégèses coraniques tafâsîr. Les plus connues en Mauritanie sont celles d’al-Jalâlayn Égypte, fin xve siècle – surnom honorifique commun aux deux auteurs al-Maḥillî qui a commencé cette œuvre et as-Suyûṭî qui l’a achevée –, celle aussi d’Ibn Kathîr Syrie, xive siècle, d’al-Yadâlî lettré maure du xviiie siècle de la tribu des Idawday de la confédération des Tâshumsha du Trarza, d’al-Qûrṭûbî Andalousie, xiiie siècle, d’al-Assawî Égypte, xixe siècle, d’Ibn al-Jûzî Andalousie, xive siècle, d’al-Khazan Iraq, xiiie siècle, d’aṭ-Ṭabarî Tabaristan, nord de l’Iran, ayant vécu en Iraq, fin ixe siècle et début xe siècle, et enfin d’al-Maqarrî confins algéro-marocains, fin xvie siècle et début xviie siècle. 29À un dernier stade, au Trarza, comme dans les autres régions, la Sunna, qui consigne les paroles et les actes du Prophète, fait l’objet d’un apprentissage personnel dans les bibliothèques khazânât privées de lettrés. Définissant un modèle de conduite pour tout musulman, sa lecture est particulièrement conseillée. De tous les traditionnistes ayant rendu compte des dits et faits du Prophète, le plus renommé est Bûkhârî Bokhara, Transuxiane, ixe siècle ; son livre, intitulé le Ḍaḥîḥ L’Authentique, est considéré, en Mauritanie, et plus généralement dans tous les pays sunnites, comme le plus véridique après le Coran. 30Dans certaines mosquées, comme celle de Chinguetti Adrar, la lecture des traditions recueillies par al-Bûkhârî succède quotidiennement à la prière de la fin de l’après-midi al-’asr. Après l’étude du Ḍaḥîḥ de Bûkhârî, vient en second lieu, celle de la Muwaṭṭa’ La voie rendue aisée de l’imâm Mâlik Médine, viiie siècle et du Ḍaḥîḥ de Muslim Nishapour, ixe siècle. Les lettrés qui désirent approfondir leur connaissance en la matière abordent des œuvres concernant la science des traditions du Prophète dirâya, comme celle d’Ibn Ḥajar al-’Asqalânî Égypte, fin xive et début xve siècle et celle d’Ibn Ḍalâḥ Iraq, xiiie siècle. Le terme élogieux de muḥaddith est attribué en Mauritanie au spécialiste des hadith ou dits du Prophète aḥâdith. Techniques pédagogiques Procédés mnémoniques utilisés pour l’apprentissage des savoirs auxiliaires » au Coran 17 Dans le droit islamique, l’héritage étant fonction de la parenté des héritiers avec le défunt, il ... 31La maḥâẓra utilise des procédés mnémoniques pour faciliter l’apprentissage du droit musulman et de la prosodie. Ainsi, la phrase Vis tant que tu as de quoi subsister » ’ish laka rizq » donne l’initiale des sept empêchements à l’héritage en droit malékite Khalîl 1995 453. Le ayn est l’initiale du mot mort-né » ’adamu al-listiḥlali », le shîn de l’incertitude concernant l’individu décédé en premier lieu dans un accident shakku as-sabaqi17, le lâm du désaveu de paternité li’ân, le kâf de l’infidélité kufr, le râ’ de l’esclavage riqq, le zây de l’enfant illégitime walad az-zinâ, le qâf de l’homicide volontaire qatl amd. Cette formule mnémotechnique, utilisée dans les mḥâẓar maures est citée par certains commentateurs malékites Ibn Asîm 1958 430, n. 1132 ; ceci témoigne que, dans un pays comme la Mauritanie où l’essentiel du savoir transmis est constitué de références scripturaires musulmanes, cette transmission est opérée selon des méthodes pédagogiques utilisées au début de l’islam. 32En grammaire, des poèmes en langue dialectale similaires à des quatrains givân, permettent de retenir des règles syntaxiques comme celle qui énonce que les composantes fondamentales de la phrase en arabe – qu’elle soit nominale ou verbale – sont le sujet et le prédicat Une phrase ne peut être composée de deux redondances sonores non nécessaires./Une phrase possède deux supports fondamentaux, un sujet et un prédicat, comme dans l’exemple “les chameaux sont arrivés” » al-jumla min faḍlatayni - kân indafa’it lak lâ tagbal / wa al-jumla min amadtayni kîf ilbal jât u jât ibal » Norris 1968 100. 18 Les seize mètres de la poésie arabe sont ṭawîl, basîṭ, wâfir, kâmil, mutaqârib, khafîf, sarî’, r ... 19 Il existe quatre sortes de pieds le sabab khafîf la corde légère correspond à CVC, le sabab th ... 33De même, de petits poèmes mnémoniques, en arabe classique, sont utilisés dans le domaine de la poésie, pour retenir la structure des mètres. La métrique arabe ilm al-’arûḍ liée à des unités prosodiques appelées tafâ’il. C’est leur diversité ainsi que leur combinaison dans un hémistiche misrâ’ qui caractérisent les seize genres de mètres buḥur de la prosodie arabe18. Les formes de tafâ’îl se distinguent par un nombre défini de pieds ajzâ’ variant entre deux et quatre, et par la composition particulière, pour chaque pied, des consonnes, des voyelles longues et des voyelles brèves19. 20 Les différentes formes de tafâ’îl sont mustaf’ilun CVC/CVC/CV/CVC, fâ’ilun CVlongue/CV/CVC, ... 21 Par exemple, le vers de poésie à usage mnémonique qui donne la structure du mètre appelé wâfir est ... 34Selon l’habitude des grammairiens arabes, des dérivés de f’l, racine du verbe faire, qui sert de paradigme, permettent de retenir la structure des tafâ’îl distincts, par l’agencement des divers types de pieds qui les composent. Huit schèmes, construits d’après la combinaison de leurs consonnes, de leurs voyelles brèves et longues, représentent ces différentes formes20. Par ailleurs, de courts poèmes en arabe classique aident à se remémorer pour chaque genre de mètre, l’organisation des taf’îlatun qui le caractérise21. Des colles féminines sur l’histoire du Prophète et des colles masculines sur le droit, la grammaire et la poésie 35Dans certaines familles maraboutiques du Trarza, l’enseignement pluridisciplinaire assuré au sein de la maḥâẓra se poursuit dans le cadre familial. Les femmes jouent un rôle important en ce qui concerne la transmission de l’histoire du Prophète sîra. Ainsi, les grands-mères ou les tantes maternelles, férues de l’histoire prophétique répètent à leur jeune parent, avant qu’il ne s’endorme, le nom des hommes de la lignée patrilinéaire du Prophète, soit vingt noms, des femmes de sa lignée matrilinéaire, soit quatorze noms, de ses fils, soit quatre noms, de ses filles, soit quatre noms, des mères de ses enfants, soit deux noms, de ses califes, soit quatre noms, de ses compagnons ayant gagné le paradis, soit dix noms. Plus tard, lorsque l’enfant atteint quatorze ans environ, elles lui apprennent le nombre des combattants alliés au Prophète dans ses vingt-huit batailles ghazawât contre des non-musulmans. 36Ces formules mnémoniques, lorsqu’elles traitent d’informations qualitatives, sont explicites comme l’illustre cet exemple Les califes orthodoxes sont Abubakr, Umar, Uthmân et Ali » al-khulafa’ ar-râshidûn Abu-Bakrin wa Umar wa Uthmân wa Aliyun ». En revanche, celles qui ont trait à des informations quantitatives date, nombre… sont plus ésotériques, puisqu’elles ne peuvent être déchiffrées que grâce à une connaissance minimale d’une branche du savoir ésotérique islamique ḥikma, ou science du secret des lettres sirr al-ḥarf, qui établit une correspondance stricte entre les consonnes et les chiffres. 37Les formules mnémotechniques sont généralement versifiées et concernent des sujets d’ordre historique. Par exemple, deux hémistiches fournissent les dates de fondation de la cité ancienne de Chinguetti et de celle qui l’aurait précédée, Abayr La première Chinguetti fut construite en l’an qas/et la Chinguetti d’aujourd’hui fut bâtie en l’an khas » Shingîti al-awal bunyat fi’aâmi qas/wa buniyat Shingîti ḍi fi aâmi khas » Leriche 1952 340. En additionnant les chiffres correspondant aux consonnes composant le premier mot, qas », la date de création d’Abayr apparaît q 100 + s 60 = 160 » ; de la même façon, avec le mot khas » on obtient l’année de fondation de Chinguetti kh 600 + s 60 = 660 ». 22 Aḥmad wuld Jamad est un lettré ayant vécu au début xxe siècle. Il appartient aux Idawday, tribu re ... 38L’exemple de deux vers composés en arabe classique par Aḥmad wuld Jamad22, indiquant le nombre de combattants alliés au Prophète dans la bataille de Badr, illustre cet art mnémotechnique 23 Ce poème a été recueilli par mes soins. Celui qui souhaite connaître le nombre de personnes ayant combattu dans l’armée musulmane de Badr/sera chanceux, aussi bien ici-bas que dans l’au-delà et trouvera précisément la réponse à sa col escarpé, le piétinement incessant, et le sabre tranchant ; les Muhâjîrîn/, les Ansâr et les Arab, dans l’ordre de succession »23. faman yurid adada ahli badri/yasud wa bitafsîli dhâk yadrîfajun wa âsun aq liman qad hâjarâ/Awsin wa khazrajin bi tartibîn jarâ ». 39Dans le premier vers, la somme de l’équivalence numérique des consonnes composant le verbe yasud y = 10 + s = 300 + d = 4 donne la réponse trois cent quatorze personnes ont combattu avec le Prophète dans la bataille de Badr contre des non musulmans. Le second vers précise le nombre de combattants pour chaque groupe allié les Muhâjîrîn, qui, originaires de la Mecque, ont fui la persécution des non musulmans pour suivre le Prophète à Médine, les Ansâr, tribu yéménite de Médine, et les Arab, les bédouins d’Arabie. L’équivalent numérique du mot fajun ∫= 80 + j = 3 donne le nombre de muhâjrîn, soit 83, le mot âs â = 1 + s = 60, le nombre de Ansâr, soit 61, enfin, le mot aq = 70 et le q = 100, le nombre d’’Arab, soit 170. La somme des combattants des trois groupes alliés 83 + 61 + 170 = 314 équivaut précisément au nombre total des combattants du Prophète 314 ; le contenu implicite du second vers correspond donc bien à celui du premier. 24 cette expression berbère znâga, qui est l’équivalent arabe de quel excellent homme » ni’ma ... 40Par ailleurs, l’œuvre locale de référence concernant l’histoire du Prophète a été écrite par un érudit désirant combler son ignorance en la matière, laquelle lui fut révélée par une femme d’une tribu maraboutique du Trarza qui l’avait interrogé sur le nom du guide de Muḥâmmad, lors de son exil hijra. Ce lettré du Trarza, originaire de la tribu des Midlish, qui a vécu à la fin du xviie siècle et au début du xixe siècle, est al-Badawî. Vers trente ans, alors qu’il était encore à la mahâzra, il rencontra, dans un campement des Idablḥsan, une vieille femme qui lui demanda son patronyme. Comme la plupart des femmes de cet âge, elle connaissait parfaitement les généalogies tribales et n’eut aucun mal à situer sa famille dans l’inextricable réseau de lignées. Elle manifesta la connaissance de sa prestigieuse ascendance, par la formule d’admiration habituelle, à l’écoute d’un nom évoquant la noblesse, le savoir ou la religiosité wakhayrt24. 25 Le nom du guide du Prophète qui l’accompagna lors de son exil hijra est Abdallah ibn al-Urayqiṭ... 41Après avoir fait l’éloge de sa famille, en vantant tout particulièrement les qualités d’érudition de ses membres, elle donna l’occasion à ce lettré d’en faire la preuve ; elle l’interrogea sur un point d’histoire prophétique, en lui demandant le nom du guide du Prophète lors de sa fuite de la Mecque vers Médine. Ne sachant pas répondre, al-Badawî décida de mettre fin à son ignorance en matière d’histoire prophétique par la rédaction d’ouvrages traitant de ce sujet ; le premier, Naẓm ansâb al-’arab, concerne les généalogies des Arabes, et le second, al-Ghazawât, les conquêtes des débuts de l’islam. Son premier livre commence par le point sur lequel la femme des Idablḥsan l’avait interrogé il mentionne le nom du guide du Prophète lors de son exil25. 42Dans certaines familles maraboutiques du Trarza, le père ou l’oncle maternel joue également un rôle important par les colles qu’il pose à son jeune parent. Ce type de colle est appelé zarg, mot qui signifie lancer. Poser une colle à quelqu’un est en effet analogue au fait de lui lancer une balle, car celui-ci doit lui répondre jawâb, ou, en l’occurrence, lui renvoyer la balle. Ces colles qui concernent tous les domaines juridique, grammatical, poétique, théologique… s’apparentent à des exercices. 26 Le titre donné au poème correspond en fait au premier vers selon l’usage arabe dit maṭla’. 27 La durée de viduité, après laquelle une veuve peut se remarier lorsqu’elle n’est pas enceinte, est ... 43Ainsi, pour vérifier les connaissances en grammaire d’un enfant, son parent mentionne un proverbe ou un vers de poésie pouvant faire l’objet d’une analyse grammaticale. Par exemple, lorsqu’il cite le premier vers du poème Bânat Su’âdu Su’âd m’a quitté26, composé par le contemporain du Prophète, Ka’b Ibn Zuhayr, l’enfant doit reconnaître d’une part, que bânat est un verbe conjugué au passé composé et, d’autre part, que Su’âdu est le nom propre d’une femme qui a la fonction de sujet dans la phrase, comme l’indique sa terminaison en u. Il peut aussi lui être demandé de réciter un poème ou encore il peut être interrogé sur un point précis du droit malékite, par exemple la durée du délai de viduité idda d’une veuve27. 44Ce type d’enseignement familial est doté d’un caractère ludique qui contraste avec la rigidité de l’enseignement avec un maître ; il récompense le méritant et ne punit pas l’ignorant. Par exemple, si un jeune garçon répond à une colle » alors que son père ou son oncle prépare le thé, il a droit exceptionnellement à un verre de ce précieux breuvage. D’autre part, les vieillards immobilisés ont souvent à leurs côtés une malle sandûg, contenant entre autres choses des friandises dattes, biscuits, cacahuètes réservées aux enfants qui répondent correctement aux questions posées. 45Des devinettes permettent de développer le calcul mental, comme celle-ci Une jeune femme très intelligente élevait une tourterelle des oiseaux passèrent et on lui demanda combien ils étaient ajoutez ma tourterelle à ces oiseaux et la moitié de leur nombre et vous obtiendrez 100. Les oiseaux étaient au nombre de 66 66 + 33 + 1 = 100 » Dubié 1947 15. D’autres devinettes renvoient au calcul mental et au droit musulman, l’une par exemple concerne l’héritage Un héritage comprend dix-sept chameaux l’un des héritiers a droit à la moitié, l’autre au tiers, l’autre au neuvième. Comment le cadi opère-t-il le partage sans tuer ni vendre un seul animal ? Le cadi emprunte un chameau et le conjoint au troupeau qui s’élève ainsi à dix-huit têtes ; il donne la moitié, soit neuf chameaux au premier héritier, le tiers soit six au deuxième héritier, le neuvième soit deux, au troisième héritier, et renvoie le dix-huitième chameau emprunté » ibid.. 46Cependant, dans le cas où l’enfant demeurait incapable de répondre à ces colles, le père menaçait son fils s’il ne prenait pas ses études au sérieux, il deviendrait non pas un lettré digne de ce nom, mais un simple berger. En effet, les activités économiques des tributaires et des marabouts centrées sur l’élevage étaient pratiquement identiques, se distinguant surtout de celles des guerriers qui, jusqu’à la période coloniale, vivaient de pillage. Par conséquent, ce qui différenciait fondamentalement un marabout zawî d’un tributaire znâgî, hormis sa naissance, c’était le savoir. Afin qu’il s’applique dans ses études, le père rappelait donc à son fils qu’on ne naît pas marabout, mais qu’on le devient. Et pour lui donner un avant-goût de ce qui l’attendait s’il n’était pas suffisamment studieux, son père lui confiait pendant une journée la garde du bétail. L’enfant prenait alors conscience que la vie maraboutique était bien plus douce que celle du tributaire contraint à marcher seul sous le soleil sur de longues distances, pour surveiller son troupeau. 47Ensemble, les enfants inventent, par ailleurs, des exercices collectifs réservés à la récitation poétique, pour contrôler leur connaissance et exercer leur mémoire. Des élèves de dix ans environ forment à cette fin un petit groupe. Ils prennent la parole à tour de rôle, selon un ordre déterminé par un tirage au sort effectué avec des brindilles. Lorsque le premier commence à réciter des vers de poésie arabe, le second doit, à la suite, se remémorer un poème qui débute par la dernière lettre de la composition poétique précédemment citée, et ainsi de suite jusqu’à élimination progressive des récitants. Ce type d’exercice est appelé invitation » nadwa », car si un jeune homme arrive dans un campement qu’il ne connaît pas, les jeunes de sa classe d’âge asr l’invitent à pratiquer cette joute poétique, pour l’intégrer à leur groupe. 48Le Coran n’échappe pas à ces révisions ludiques effectuées par les élèves à l’insu de leur maître. Ceux-ci, le cours terminé, bien qu’ayant laissé leur tablette chez leur enseignant – ce qui devrait les empêcher de réviser leur leçon en son absence – continuent tout de même à s’interroger mutuellement. Cette révision collective s’apparente à un jeu où chacun récite une section ḥizb du Coran, déterminée par le groupe. Si celui qui est interrogé ne s’en souvient pas, les autres élèves proclament qu’ il est tombé » ṭâḥt », c’est-à-dire qu’il est éliminé. En conséquence, celui qui connaît le mieux le Livre sort gagnant de ce jeu éducatif. Lecture, récitation et écriture du Coran 28 Dans certaines tribus du Trarza, il y a encore une trentaine d’années, l’apprentissage pouvait se ... 49La première étape de l’enseignement coranique consiste dans la lecture qirâ’a à haute voix. Cet apprentissage, qui, dans les familles maraboutiques est généralement assuré par la mère, débute par la reconnaissance progressive des lettres de l’alphabet ḥurûf al-hijâ’. L’acquisition de la lecture a lieu selon la phonétique propre à chaque région28. Dans un premier temps, l’enfant apprend à distinguer les lettres, en particulier d’après leurs signes diacritiques, c’est-à-dire selon qu’elles aient un ou deux points nuqat au-dessous du tracé ou un, deux ou trois au-dessus. Par exemple, après avoir mémorisé la graphie de la lettre ḥ, l’élève notera qu’elle se transforme en kh, si un point est ajouté au-dessous et en j, s’il est au-dessus. Une fois qu’il a assimilé les lettres isolées de l’alphabet, il apprend à les discerner quand elles sont liées, les lettres arabes changeant légèrement de forme selon leur position dans le mot, qu’elles soient initiale, médiane ou finale. 50Afin que l’élève puisse reconnaître les lettres arabes sous leurs diverses réalisations graphiques, elles sont inversées à l’intérieur d’un mot. Une liste formelle de mots permet à l’élève de réviser toutes les lettres de l’alphabet 1. abujad a, b, j, d 2. hawaz h, w, z 3. ḥaịay ḥ, ṭ, y 4. qarisat q, r, s, t. 5. fakhdhun f, kh, dh 6. kaliman k ; l, m, n 7. sa’faḍ s, , f, ḍ 8. bikrun b, k, r 9. jalsun j, l, s10. dmatun d, m, t11. hanthun h, n, th 29 Les signes vocaliques sont au nombre de quatre la fatḥa qui donne le son a, la ḍamma, le son u, ... 30 Selon la lecture de Nafi’, connue en Mauritanie, le Coran est composé de six mille six cent soixan ... 51Dans un second temps, l’enfant retiendra les signes dits tamḥas, comme celui qui indique le redoublement de la consonne shadda. Ce dernier apprentissage comprend également celui des voyelles qui, en arabe, ne sont pas des lettres mais des signes29 figurant au-dessus ou au-dessous des consonnes. Une fois cette première étape d’alphabétisation accomplie, l’élève déchiffrera les sourates les moins longues du Coran ; comme dans le reste du monde musulman, la mémorisation du Livre commence par la première sourate al-fâtiḥa, puis se poursuit par les plus courtes qui correspondent à la fin du texte, jusqu’aux plus longues qui se situent à son début, depuis la cent quatorzième sourate, intitulée la sourate des Gens an-nâss, à la deuxième sourate, dite la sourate de la Vache al-baqara30. 52L’enfant apprend par cœur le passage coranique écrit sur sa planchette, par le maître. Il se tient un peu en retrait pour relire sa leçon, à voix haute, des dizaines de fois, selon sa rapidité à mémoriser. Afin de compter le nombre de relectures nécessaires à la mémorisation, l’élève trace un point sur le sable à chaque lecture, formant parfois un triangle ou un rectangle de cinquante points. Cette technique d’apprentissage basée sur la répétition est valable pour toutes les sourates du Coran, à l’exception de celles qui sont les premières à être enseignées ; ces sourates sont en effet connues par l’élève avant même qu’il ne sache lire, étant donné qu’il les entend réciter inlassablement par ses camarades. 31 Le titre de cette sourate se réfère à la traduction de R. Blachère 1980 30. 32 Un autre type de subdivision du Coran appelée njuz comprend deux sections aḥzâb. 53Afin de faciliter son étude, le texte coranique est divisé en soixante sections aḥzâb dont chacune porte un nom. La première section, appelée par référence aux trois mystérieuses lettres initiales de la sourate intitulée la génisse31 al-baqara, II, alif-lâm-mîm, est enseignée en dernier lieu, tandis que la dernière section, nommée sabîh, est la première à être apprise. Chacune de ces sections32 est elle-même divisée en huit sous-sections ath-thumn. 54La longueur de la leçon kitba inscrite sur la planchette, dont la taille grandit au fur et à mesure de l’apprentissage, varie avec l’âge de l’enfant ainsi qu’avec sa capacité à mémoriser. Elle peut représenter le huitième d’une section du Coran, pour un bon élève qui en retient une en huit jours. L’élève modèle qui a appris le texte coranique en trois ans continue, deux années après, à réciter quotidiennement trente sections devant son maître, afin de ne pas les oublier. 33 Dans l’enseignement de la Torah, chez les Juifs marocains, l’apprentissage de la lecture est égale ... 55Après avoir exercé sa mémoire et appris à lire, l’élève est en dernier lieu initié à l’écriture33. Si la récitation tilâwa du Coran est hautement valorisée, son écriture kitâba n’est qu’accessoire. Ce n’est que lorsque l’enfant connaît par cœur deux à quatre sections, qu’il débute l’apprentissage de l’écriture. Son calame qalam suit le tracé préalable du maître, jusqu’à ce que celui-ci l’autorise à écrire de façon autonome. L’écriture est tout d’abord accomplie sous la dictée de l’enseignant, puis, lorsque l’élève maîtrise la lecture du Coran, il le copie directement. Pour être la plus fidèle possible au texte d’origine, cette écriture ne doit pas omettre les signes vocaliques. Modes de transmission et types de textes Une récitation coranique irréprochable 34 Nous avons mis en évidence dans un précédent article Fortier 1997 l’importance de la mémorisatio ... 35 Un tel souci de perfection se retrouve dans l’enseignement de la Torah La lecture correcte des ... 56Lecture et écriture apparaissent subordonnées à la mémorisation et à la récitation34 qui constituent la finalité de l’enseignement coranique. Le Coran étant considéré par les musulmans comme l’expression du verbe divin, se l’approprier c’est faire chair ce message, afin qu’il reste indéfiniment vivant. Bien que le texte coranique serve de texte de base à partir duquel l’enfant est alphabétisé, le réciter demeure plus essentiel que le lire ou l’écrire. En outre, cette récitation doit être parfaite35 par respect pour la parole divine qui est unique, fixée à tout jamais, éternelle et inaltérable. Comme le conseille le juriste malékite du xe siècle qu’est Qayrawânî 301-303 Il n’est pas licite pour toi […] de réciter le Coran avec des accents cadencés comme dans le chant profane. Le Livre d’Allah a trop de majesté pour qu’on se permette de le réciter autrement qu’avec une grave componction et dans des conditions telles qu’on soit persuadé qu’Allah en sera satisfait et l’aura pour agréable et en portant toute son attention à cette pieuse récitation. » 36 Abû Bakr ibn Mujâhid m. 324 / 936 de Bagdad a authentifié sept traditions différentes riwâyât, ... 37 Ou selon sept lectures », le terme arabe utilisé étant aḥruf qui désigne au sens propre les le ... 57À la différence de la plupart des textes en arabe classique, où ne figurent que les consonnes, le texte coranique comporte également les signes vocaliques, afin qu’il n’y ait aucune ambiguïté lors de sa lecture. Parmi les dix modes de lecture al-qirâ’ât’’ashar36, dont sept al-qirâ’ât as-sab’ sont très répandus mutawâtir dans le monde musulman, les malékites adoptèrent le mode de Nâfi’ ; un hadith ayant laissé le choix en la matière Le Coran a été révélé avec sept variantes37 ; choisissez donc celle qui vous est la plus commode » Bûkhârî 1993, t. 2 774. Le mode de Nâfi’ possède deux variantes le Warsh, qui prononce distinctement la hamza, et le Kalun, qui néglige sa prononciation. En Mauritanie, le Coran est enseigné dans un premier temps, selon cette première variante, et l’étudiant qui souhaite diversifier sa lecture s’initie à la seconde. 58Les différents types de lecture ont parfois des conséquences sur le sens même du texte coranique. Ainsi, l’une des causes de divergence d’interprétation des écoles juridiques islamiques tient en partie à la diversité de ces lectures. À cet égard, des juristes Khalîl 1995 78 se sont posés la question de savoir si la prière était invalidée par une récitation défectueuse des sourates, le défaut de prononciation de certaines lettres pouvant être problématique. 38 C’est le cas également, mais dans une moindre mesure, de la lettre kaf Ainsi, les habitants de ... 59En Mauritanie, des différences régionales, dans la prononciation de quelques lettres, existent. Elles sont parfois à l’origine de controverses importantes lorsqu’il s’agit de la récitation du Coran, comme c’est le cas pour la lettre jim38. Dans l’ensemble du pays, cette lettre est prononcée jim lorsqu’il s’agit de l’arabe dialectal ou même de textes en arabe classique à caractère profane poèmes, généalogies…, mais lorsqu’il s’agit du Coran et des hadith, les Maures de l’Adrar, du Tagant et du Hawdh prononcent cette même lettre djim, tandis que les Maures du Trarza, hormis les Idawa’li qui sont originaires de l’Adrar et du Tagant, la prononcent jim. 39 Aḥmad ibn al-Amîn ash-Shinqîtî est le premier auteur maure à avoir écrit un ouvrage traitant de sa ... 60Aḥmad ibn al-Amîn ash-Shinqîtî39, lettré de la tribu des Idawa’li m. 1331 H./1912-1913 relate ainsi cette discorde dans son livre al-Wasîṭ Les partisans du jim reprochent aux partisans du djim de manquer à leur devoir envers Dieu ils prononcent bien le jim dans leur conversation et quand il s’agit de la lecture des poèmes et des livres de science, mais quand il s’agit des livres sacrés, ils le déforment en djim. Les partisans du djim prétendent qu’au contraire ils prononcent correctement quand il s’agit des livres sacrés tandis qu’ils se permettent de prononcer le jim dans les autres cas. L’argument des partisans du jim est que le djim dur est une lettre soudanaise, étrangère aux pays arabes. Les partisans du djim leur rétorquent que le jim est une lettre chleuh et berbère “Comme vous dénigrez notre parler nous dénigrons le vôtre leur répliquent-ils” [...]. Le djim dur est la lettre classique et le jim maghrébin n’en est qu’un produit. Dans la plupart des pays, les lecteurs ont adopté le djim classique, exceptés les Maghrébins et, avec eux les gens du Trarza » Ould Lemine 1953 105-107. 61La querelle du jim » jim mtafi’aza » a nourri un échange important de consultations juridiques fatâwâ au xviiie siècle en Mauritanie, en particulier entre un érudit de la tribu maraboutique de l’est des Tanwâjyû Sîdî Abdallah wuld Abû Bakr at-Tanwâjîwî m. 1145 h./1732-33 partisan du djim, et un érudit du Trarza de la tribu maraboutique des Idawday, Muḥâmmad al-Yadâlî m. 1166 H/1752-53 partisan du jim. La biographie de ce lettré, dans le Fatḥ ash-Shakûr, le décrit comme un grand imam, spécialiste des sept lectures du Coran, apprises chez Sidî Aḥmad al-Ḥabîb al-Lamṭî as-Sijilmâsî de Sijilmassa qui, de retour en Mauritanie, a rectifié les fautes de lecture de ses compatriotes, notamment la prononciation du jim Hamel 1992 418, notice 200. Depuis la consultation juridique historique de Sidî Abdallah wuld Abû Bakr at-Tanwâjîwî, la majorité des Mauritaniens, à l’exception de quelques groupes maraboutiques de la Gibla au Trarza, adoptèrent le jim dans la lecture du Coran, appelé le jim des membres de la tribu des Tanwâjyû jim Tanwâjîw. 62L’art de la psalmodie tajwîd du texte coranique se décline sur différents rythmes ; le plus rapide ḥadr est utilisé pour l’apprentissage du Coran, le rythme modéré tadwîr pour la récitation de longues prières à l’occasion du Ramadan, et le plus lent tartîl pour les prières quotidiennes. La psalmodie du Coran doit faire l’objet d’une certaine discipline comme le montre ce verset lxxv, 16-18 Ne remue point ta langue, en le disant, pour en hâter l’expression bayân ! » Blachère 1980 626. La psalmodie parfaite est une marque de respect à l’égard de la parole divine et une des formes de l’adoration de Dieu ibâda, aussi le Livre lxxiii, 4 exhorte-t-il à la pratiquer soigneusement Psalmodie avec soin la Prédication » ibid. 621. Étancher sa soif de savoir 40 Celui qui a mémorisé l’ensemble du texte coranique dans la société maure est plus rarement désigné ... 41 La racine du terme ḥafiẓ, ḥfẓ, véhicule l’idée d’indestructibilité Chabbi 1997 484. 63Dans certaines tribus maraboutiques, il est courant que l’enfant apprenne la totalité du texte coranique, dans un délai de cinq à sept ans. Cet apprentissage est facilité par la proximité linguistique entre la langue maternelle des Maures, le ḥassâniyya, et l’arabe classique, langue du Coran. Le jeune homme qui connaît l’intégralité du Livre al-Kitâb est appelé ḥâfiẓ40, mot qui en arabe désigne le gardien, le préservateur Kazimirski 1944, t. 1 460 et qui, dans la langue classique, renvoie à l’Écrit surnaturel ineffaçable Chabbi 1997 48441. En l’occurrence, ce que le récitant conserve en lui-même, c’est la parole divine ; sa personne est investie du Coran, comme le suggère l’expression ḥassâniyya Il récite et porte le Livre divin » ḥâfiẓu wa ḥâmilu Kitâbi Allahi al-’azîzi ». 64Porter en soi le Coran signifie également porter en soi la baraka bienfaisante de la parole divine ; un hadith affirme que Les porteurs du Coran sont les élus de Dieu, ses intimes » Ibn Sahnûn 1953 83. Aussi, le Récitant » apparaît-il à son entourage, comme un intercesseur entre Dieu et les hommes. Le caractère numineux » de l’élève, investi du verbe divin, est utilisé dans des moments dangereux de passage » tel qu’un enterrement. On dit alors de celui qui connaît la totalité du texte coranique, qu’il a rompu avec l’errance » aqsar dhihâba », ce qui signifie qu’il est dans la bonne voie, celle de Dieu. 42 Cette cérémonie possède de nombreuses similitudes avec celle qui clôt l’apprentissage d’un texte r ... 65Reste encore à l’élève qui, selon l’usage, a mémorisé le Coran dans le sens inverse de l’ordre du Livre, à reprendre cet enseignement dans le bon sens. Après cette répétition qui demande généralement moins d’une année, l’élève accède à un nouveau statut. La fin de l’apprentissage du texte coranique s’apparente à un véritable rite de passage au cours duquel l’étudiant récite durant deux jours l’intégralité du Livre, devant son maître et devant deux témoins » shûd »42. Avant de commencer cette récitation, il prononce une formule conjuratoire destinée à le protéger de l’erreur d’origine diabolique Maudit soit le démon lapidé ! » ista’wadh min shayṭân rajîm ». 43 Cette expression signifie littéralement Cela existe bien ». 66Si les deux érudits jugent que la connaissance coranique de l’étudiant est suffisante, ils lui délivrent un certificat de transmission appelé ijâza. Ce terme, très répandu dans les pays de langue arabe, est construit sur le même radical qu’ajâzâ qui signifie autoriser. Comme son nom l’indique, l’ijâza autorise l’élève à enseigner, c’est-à-dire qu’il peut devenir à son tour un maître. Il est écrit de la main de l’enseignant qui utilise pour l’occasion de l’encre de couleur afin de tracer certains signes orthographiques comme les signes vocaliques. Attendu que l’encre de couleur est habituellement réservée aux copies de précieux ouvrages, son usage, lors de la rédaction de l’ijâza, témoigne de la valeur de cet écrit. Son caractère officiel est de surcroît souligné par la formule terminale aposée à la fin du document Certifié conforme » saḥah wathabata »43. 67Ce document comporte toutes les caractéristiques d’un acte juridique, puisqu’à ce sceau d’authenticité s’ajoute le nom des deux témoins » présents lors de la récitation. Par ailleurs, le niveau de l’élève est évalué par une mention takhdîr résultant de la concertation du maître et des deux experts. Trois types de distinction peuvent être attribuées dans le meilleur des cas, très bien » ḥassan jidan », dans le pire des cas, passable » mutawassiṭ », et dans le cas médian, bien » ḥassan ». 44 J’ai développé, dans un précédent article Fortier 1998, l’importance du processus d’incorporatio ... 68Dans l’ijâza, figure également le nom de celui dont l’élève tient son savoir. En l’occurrence, la chaîne de transmission du savoir sanad ne remonte pas au-delà du dernier maître, ce qui atteste que la réputation de celui-ci suffit à assurer la légitimité de la connaissance ainsi acquise. Le terme utilisé pour désigner un tel processus de transmission est particulièrement éloquent ; le mot isadar renvoie à tout être humain ou animal qui, après s’être respectivement approvisionné ou rassasié en eau auprès d’un puits, continue son chemin. Dans l’ijâza, l’expression employée pour dire qu’un élève tient son savoir d’un maître particulier peut être traduite approximativement par Un tel a étanché sa soif auprès d’un tel » vulan isadru vulan ». Cette formule manifeste explicitement que l’apprentissage du Coran est conçu comme un processus physiologique d’incorporation orale44. 69Par ailleurs, cette expression assimile le maître coranique à une source auprès de laquelle l’élève étanche sa soif de connaissances. Le disciple choisit effectivement l’enseignant auprès duquel il assouvit son désir d’apprendre, selon son niveau et sa spécialité. Dans cette recherche, associée à un déplacement physique, ce n’est qu’une fois que l’élève est rempli » du savoir de son maître, qu’il est autorisé à le quitter pour un autre. Lorsque l’étudiant, qui a poursuivi progressivement son ascension auprès de plusieurs enseignants, atteint un degré de connaissance très élevé, ses pérégrinations intellectuelles prennent fin. Nourri des connaissances accumulées par la fréquentation de ses maîtres successifs, il devient lui-même un point fixe qui attirera de nouveaux élèves. On dit alors de celui qui est devenu potentiellement un maître, qu’il a pris l’ijâza » yagbadh ijâza ». 70Dans la société maure, l’ijâza est réservé au Coran et ne concerne pas d’autres savoirs. Ceci tient à la spécificité du savoir coranique qui consiste en un unique livre dont l’apprentissage reste limité dans le temps, encore qu’il s’inscrive dans la longue durée. Car si le savoir coranique est circonscrit, il n’en est pas de même des autres savoirs qui sont sans fond, comme l’océan al-bâḥr auquel ils sont généralement comparés. Compte tenu de leur caractère abyssal, leur étude n’a pas de fin ; la lecture d’un ouvrage conduit, en effet, à se référer à un autre plus approfondi et ainsi de suite, indéfiniment. 45 Cette expression a le même sens que l’expression française connaître quelque chose de A à Z ». 46 Il semble qu’il s’agisse d’un propos prêté de manière posthume à Khalîl puisque dans l’édition ara ... 71Le Mukhtasar Précis de Khalîl est un ouvrage si dense, qu’une expression ḥassâniyya45 couramment utilisée afin de signifier que quelqu’un connaît une chose parfaitement, renvoie à ce livre en reprenant explicitement ses premiers et derniers mots. Khalîl termine, dit-on46, son Mukhtasar par l’aphorisme Et maintenant, vous êtes tout juste capable de prier », suggérant qu’en dépit de la lecture de cette œuvre, fût-elle un précis particulièrement riche, le lettré ne doit pas s’en contenter, car ce qui lui reste à apprendre est immense. La référence à la prière, qui est au cœur de la pratique musulmane, s’explique par le fait que la connaissance de ses subtilités représente le symbole du savoir religieux ; en témoigne l’expression ḥassâniyya utilisée pour faire l’éloge d’un érudit Il connaît les règles de la prière » yaraf ḥukum salâtu ». L’expression finale de Khalîl, empreinte d’humilité, invite donc le lecteur à continuer sa quête de savoir, sans tomber dans l’illusion qu’il a atteint le fond de l’océan des connaissances alors même qu’il n’est qu’à la surface. En conséquence, l’ijâza ne peut attester de la transmission d’un tel savoir qui, du fait de son ampleur, ne peut être embrassé par l’esprit humain. Un apprentissage spécifiquement coranique 72La transmission du Coran semble donc se distinguer de celle des autres savoirs arabo-musulmans droit, grammaire…. Comme le Livre est unique, son apprentissage est, par nature, fini et limité dans le temps ; en revanche, dans les autres domaines de connaissance, le nombre de livres variant selon les spécialités et les niveaux, leur étude est infinie et illimitée. Surtout, l’enseignement coranique ne peut avoir lieu que sous la direction d’un maître qui contrôle rigoureusement l’apprentissage, alors même qu’un autodidacte peut directement s’initier aux autres types de savoir sans la nécessaire médiation d’un enseignant. Ainsi, en dehors du temps strictement consacré à l’étude du Coran, l’élève n’est pas autorisé, pour réviser sa leçon, à emporter chez lui sa planchette, de crainte qu’un tiers ne l’induise en erreur. 73À l’opposé, l’enseignement des autres savoirs se prolonge, en milieu maraboutique, dans le cadre familial ; l’histoire des débuts de l’islam ainsi que les traditions du Prophète sont le plus souvent abordées par des parentes, le droit et la grammaire, par des parents. En outre, tandis que le texte coranique est appris par cœur, les disciples de la maḥâẓra ont recours à des procédés mnémoniques pour retenir certaines règles de grammaire ou de droit. De plus, le seul mode de contrôle de connaissance du Livre est sa récitation, alors que les autres savoirs font l’objet d’interrogations, leur apprentissage étant fondé non seulement sur la mémorisation, mais également sur la compréhension. Enfin, les punitions jouent un rôle essentiel dans la manière d’enseigner le Coran, alors que l’aspect ludique l’emporte dans les autres domaines. 74Il semble donc que l’idée bien établie d’une unique pédagogie islamique valable pour l’acquisition de différents types de savoirs Coran, grammaire, droit… doit être relativisée. Une telle diversité de style pédagogique tient en effet à la différence de nature des savoirs enseignés ; le comment de la transmission apparaît en l’occurrence intimement lié à ce qui est transmis. Précisément, la spécificité du mode d’apprentissage du Coran s’avère être en étroite relation avec la singularité même de ce texte. Celui-ci possède en effet un statut incomparable par rapport à toute autre référence scripturaire ; nommé le Livre al-Kitâb, il est considéré par les musulmans comme la manifestation même du verbe divin. 47 Les musulmans insistent sur le caractère définitif et fixe du Coran par rapport aux corrections ... 75Le verbe coranique étant conçu comme intemporel et intangible, il ne peut connaître de modification toute humaine47. Le statut divin de ce texte détermine l’attention portée à sa remémoration exacte. Son apprentissage se fait mot à mot, afin de reproduire à la lettre le discours coranique. En outre, sa récitation ne doit souffrir d’aucune altération, et son étude d’aucun questionnement. À la différence des autres textes, trop humains », la forme du texte coranique est aussi essentielle que son contenu. Aussi, un musulman préférera-t-il s’abstenir de citer un verset qu’il ne connaît pas avec précision, plutôt que de le gauchir en l’écorchant. Ce souci d’exactitude est non seulement d’ordre cognitif mais religieux, puisqu’il témoigne d’une fidélité respectueuse à la parole de Dieu. 76Apprendre le Coran ou l’enseigner est un acte méritoire d’un point de vue religieux, ainsi que l’atteste un hadith Le meilleur d’entre vous est celui qui a appris le Coran et l’a enseigné » Nawawy 1991 280. La psalmodie du texte coranique permet, en outre, de gagner le paradis comme en témoigne cette parole du Prophète ibid. 281 On dira au familier du Coran Lis et élève-toi, psalmodie-le comme tu le psalmodiais en ce monde, car ta demeure sera déterminée par le dernier verset que tu liras. » 77La profération de versets ou même de simples mots du Coran est par ailleurs nécessaire dans tous les rites musulmans, que ce soit pour la prière où quelques sourates seront récitées, dans le mariage où la fâtiḥa sera dite à voix haute, ou encore avant toute action où le mot bismillah est prononcé. Comparé aux textes fondateurs d’autres religions, le texte coranique est non seulement la référence fondamentale en matière de dogme, mais ses versets sont aussi fréquemment cités dans l’accomplissement des pratiques rituelles. 78De plus, du fait du caractère surnaturel de ce verbe, sa connaissance donne à celui qui le récite un pouvoir supra-humain. À la différence des autres savoirs, le savoir coranique est donc également un pouvoir. Le statut absolument unique du Coran explique la singularité de son mode de transmission et rend compte de l’existence, dans les sociétés musulmanes, d’une véritable pédagogie coranique », distincte des formes d’apprentissage des autres textes.
ILMUKUNCI KESUKSESN BACA A'UDZU 17KALI,BASMALLAH 17KALI,ISTIGHFAR 17KALI,SYAHADAT 17KALI,SHOLAWAT 17KALI,SUBHANALLOH 17KALI,SURAH AL IKHLAS 17 KALI,INNALILLAHI WAINA ILAIHI ROJI'UN 17KALI,HASBUNALLOHU WANIMAL WAKIL 17KALI,TERUS BACA DOA NYA ILAHI ANTA MAQSUDI WARIDHOKA MATLUBI WAUFAWIDU AMRI ILALLOH,IYAKANA BUDU WAIYA KANASTA'IN

19 ILMU TENAGA DALAM BIOLISTRIK Insya Allah berguna untuk meningkatkan seluruh daya metafisik, bangkitkan kekuatan jati diri dan segala niat tenaga dalam Tasbih Karomah Akbar ini cocok menjadi pegangan tokoh agama, pejabat, pemimpin, pengusaha, spiritualis, penyembuh alternatif atau guru ilmu hikmah Loud Chevy Cruze Tasbih Karomah Akbar ini

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ILMUKUNCI KAROMAH ALFATIHAH ( IKKA ) Keilmuan IKKA ini lebih banyak ditekankan kepada pengobatan baik lahir ataupun bathi dan dapat dilakukan secara langsung ataupun jarak jauh, Insya Allah. hasilnya diharapkan dengan terbukanya IKKA, ini dapat menjadikan kita semakin memahami arti yang terkandung dalam surat Alfatihah serta AlIsro': 36). Oleh karena itu pengetahuan tentang makna syahadat menjadi syarat diterimanya dan terbukanya pintu surga. Rasulullah SAW bersabda. "Barangsiapa meninggal dalam keadaan mengetahui bahwa tidak ada tuhan yang berhak disembah kecuali Allah, niscaya dia akan masuk surga." (HR. Muslim). Syarat kedua, Al Yaqin (meyakini). pG19W8.
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